Au bout des rails

au bout des railsAu bout des rails
Texte de Manuela Salvi
Illustrations de Maurizio A. C. Quarello

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Au-bout-des-rails-3Monsieur Victor est un conducteur de train, heureux. Fier de sa machine à vapeur, il assure à ses passagers un voyage sécurisé et rapide. Avec Magda la contrôleuse, il irait n’importe où !
Hélas… un jour, il est surpris de découvrir que les rails ont disparu et que le chemin s’arrête brusquement dans une campagne déserte. Où sont passés les rails ? Et comment pourrait-on reprendre la route ?

Si un passager est prêt à attendre les secours, si un autre prend le chemin inverse à pied, Victor et Magda pensent qu’il serait préférable de peindre au sol un itinéraire. Mais alors, une autre question se pose ! A droite ou à gauche ?
Le cœur serré, contraints de prendre l’un est l’autre des chemins différents, Victor et Magda se séparent. Un pinceau dans chaque main, des lignes bien parallèles, l’un part à droite, l’autre part à gauche.
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Qu’il est grand le monde ! Les traits que Victor trace au sol le mènent vers des contrées lointaines ; villes, déserts, forêts, mers… Mais arrive le moment où il se retrouve en panne de peinture ! Pour avancer, doit-on suivre obligatoirement des lignes ? Ou peut-on s’aventurer dans le monde sans rails, sans contrainte, libre comme au temps de sa jeunesse ? C’est enthousiasmant ! grisant !

Le train de Victor est certes beau, mais Victor découvre d’autres moyens de locomotion qui le charment tout autant… Montgolfière, paquebot, voiture de course, vespa, sous-marin, chameau… Et les mois passent.
… Jusqu’au jour où… Je vous laisse découvrir la suite…
A droite ? A gauche ? Il arrive qu’un jour les routes se rencontrent.

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Attirée par les illustrations et les couleurs, le tout très vintage, c’est un peu le hasard qui m’a fait le prendre. Dans les livres pour enfants, j’aime les mots qui me font voyager, rêver, mais j’aime encore plus les dessins ! Avec cet album, le hasard a bien fait les choses, j’ai été gâtée par les dessins et l’histoire.
Les auteurs ont voulu transmettre aux enfants qu’il était bon parfois de prendre d’autres routes pour pouvoir progresser et grandir. Au bout des rails, il y a l’aventure… et des chemins non balisés. Ça demande du courage, mais les expériences sont enrichissantes et développent l’esprit.

A recommander !

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Le train bleu

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Challenge de Titine

Challenge Agatha Christie de George
Mois du polar avec Sharon

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 le train bleu
Le train bleu
Agatha Christie

 

Cœur de feu, un rubis ayant appartenu à la Grande Catherine de Russie, a été acheté par le milliardaire américain Van Aldin pour sa fille chérie, Ruth Kettering. Pierre convoitée, mystérieuse, on dit d’elle qu’elle porte malheur à celui qui l’acquiert.
Fatalité ou hasard, la superstition frappe sa nouvelle propriétaire à bord du Train Bleu, une ligne qui mène ses voyageurs vers la Riviera.

Qui a volé et tué Ruth ? Plusieurs personnes seraient susceptibles de l’avoir fait et c’est à Hercule Poirot de le découvrir…
Nice, dernier arrêt !
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Éditée en 1928, cette histoire débute comme un roman d’espionnage avec des personnages cosmopolites ; un Russe, un Américain, un Grec, un Français… L’atmosphère froide, mystérieuse, sombre et oppressante, change après quelques pages pour nous embarquer dans un train luxueux en direction de la Côte d’Azur, parmi des voyageurs en quête de soleil, de légèreté et d’amour. Présent dans le train, retraité et vacancier, Hercule Poirot va être sollicité par Van Aldin pour mener l’enquête sur la mort de sa fille qui a été défigurée et étranglée dans son compartiment en pleine nuit.

Pour le plaisir de nos petites cellules grises, Agatha Christie complique la trame de ce suspense en nous baladant. Des rues malfamées de Paris, nous passons dans les quartiers chics de Londres, puis dans un petit village tranquille du Kent, St. Mary Mead que nous connaissons bien pour l’avoir découvert avec Miss Marple… Nous prenons le train et nous arrivons sur la Riviera. Cette intrigue doit se mériter ! a dû se dire la romancière… Du paysage et de nombreux personnages à soupçonner.
Autour du meurtre, munissez-vous de quoi noter, il y a…
. le groupe des suspects proches de la victime, le mari, l’amant et la maîtresse… un vaudeville ! Ruth voulait divorcer de Derek, un aristocrate désargenté épousé pour son titre, et rejoindre son amant, le comte de la Roche, un sacré gredin. Quant à lui, Derek, un joueur et un noceur, poussé par sa maîtresse Mireille, ne souhaitait pas le divorce…
. le groupe des escrocs qui veulent le rubis… Un mystérieux et dangereux criminel connu sous le nom du Marquis… Se profilent aussi un Grec et sa fille, les Papopoulos, plus receleurs qu’antiquaires.
. et le groupe qui encadre Katherine Grey, une femme de trente-trois ans qui vient d’hériter de la fortune de la vieille dame qui l’employait depuis une dizaine d’années en tant que dame de compagnie. Invitée par Mme Tamplin, une lointaine cousine, Katherine prenait le train bleu pour la rejoindre.

Dans ce roman, Hercule Poirot semble un peu désenchanté, solitaire. La retraite ne lui convient pas du tout et la compagnie de son valet George n’est pas des plus pétillantes. C’est donc avec un réel ravissement qu’il va conduire l’enquête et aborder tous les protagonistes (des chaînons les relient les uns aux autres). On le retrouve vif, charmant, toujours très confiant en ses capacités, un peu séducteur… Deux jeunes femmes vont l’aider dans ses recherches, Katherine Grey et Lennox Tamplin ; perspicaces et intuitives.

Lorsqu’elle a écrit ce roman, Agatha Christie venait de subir le décès de sa mère et de découvrir l’infidélité de son mari. Je me demande si en dessinant le personnage de Katherine, elle n’a pas mis un peu de sa personnalité, et, désirant s’affranchir de tout joug, lui offrir une belle indépendance.
Quand dans son autobiographie, elle dit « ce misérable livre », je suis loin de l’approuver ! J’ai trouvé cette enquête passionnante, bien aboutie et très fine. Comme à son habitude, elle raconte superbement la nature humaine et ses complexités. Nous épatant, toujours.
Vous l’aurez compris… je vous le recommande !
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D’autres billets chez Sharon, FondantGrignote,

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le train bleu

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Tangente vers l’est

Un livre offert par Lou
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Maylis de Kerangal

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De Moscou à Vladivostok, 9 288 kilomètres.

Aliocha est un jeune conscrit d’une vingtaine d’années qui doit effectuer son service militaire en Sibérie, le pays du goulag. Le nez écrasé contre la vitre du Transsibérien, à l’écart de ses camarades, il voit défiler le paysage. Plein de peur et de colère, il songe à sa désertion. Tout, sauf la Sibérie ! Le voyage est long, violent, les étapes dans les stations sont peu fréquentes et surtout surveillées par Letchov, le garde chiourme. Il est impossible de s’évader.
Hélène est une française d’une trentaine d’années qui fuit Anton, l’homme qu’elle aime. Elle abdique car elle ne le reconnait plus, elle ne veut plus de cette vie, de cette Russie qu’elle avait idéalisée. Elle part vers l’est, par ce train qui n’en finit pas d’avaler les distances.
Aliocha et Hélène vont se rencontrer dans le couloir du Transsibérien. Deux solitudes qui s’accostent, très peu de mots dans la fumée de leurs cigarettes, des présentations primitives, Moi Aliocha, Moi Hélène, des sourires timides, le regard maternel et sensible de la femme, le regard fiévreux et violent de l’homme-enfant. La nuit s’étire, très longue, pesante et chaloupée.
Aliocha ne se trompe pas lorsqu’il retient fermement Hélène. Il sait qu’elle peut lui venir en aide. Elle est son seul recours. Le message passe dans des mots aboyés, essoufflés, gutturaux. Si elle ne les comprend pas, elle en devine l’intensité. Elle aurait pu se débattre, crier, mais elle l’invite à se cacher dans son compartiment de première classe, touchée par son angoisse, séduite par sa fierté. Ne fuit-elle pas, elle aussi ?!
Il n’y a aucune ambiguïté à ce geste. Peut-être le regrettera-t-elle, peut-être que non.

« Le paysage défile maintenant par les ouvertures de la cellule grise qu’ils ont occupée ensemble, à touche-touche, unis dans les mêmes soubresauts, dans les mêmes accélérations et les mêmes ralentissements, où ils ont mélangé la fumée de leurs clopes et la chaleur de leurs souffles. Aliocha retient sa respiration, il n’est pas suppliant, il n’est pas une victime, il est comme elle, il s’enfuit, c’est tout. La femme pose ses yeux dans ceux du garçon – une clairière se lève dans le petit jour sale, très verte -, se mords les lèvres, suis-moi. »

Le voyage est sans fin jusqu’à la limite, Vladivostok. Bientôt Irkoutsk, le lac Baïkal, d’autres gares… et Tchita, la caserne, « la ville des exilés ». Arriveront-ils à la dépasser ? Plus loin, il y a la mer et leurs libertés.

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« Tangente vers l’est » est une superbe histoire qui raconte l’aventure de deux âmes perdues, un train mythique et un pays vaste et acéré. C’est le mystère russe, son romantisme et ses ambivalences, c’est un suspens qui compresse le souffle et qui ralentit le rythme de la lecture, ce sont des mots poètes, des mots-images, des mots passionnés, c’est une amitié, un amour, une reconnaissance, un sauvetage, une folie alliée à du courage et du tempérament. L’histoire est d’aujourd’hui, mais elle aurait pu être d’une autre époque. Le roman est court avec de belles phrases, sans vrais dialogues, à deux voix, à deux sensibilités, deux nationalités.
Entre Aliocha et Hélène, les gestes sont beaux, attentifs et prévenants, ils sont ceux d’une mère avec son enfant, d’une femme qui mate son futur amant, ceux aussi d’un garçon qui cherche protection et d’un homme captivé qui vibre… C’est sensuel, pudique et intrigant.

J’ai beaucoup aimé et je vous le recommande.

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D’autres billets chez Sharon, Mango, Philisine,

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