Barbe bleue

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Rentrée littéraire, chez Hérisson et Mimipinson, Challenge ABC Babelio et
Voyage de Lou et Hilde, destination Halloween


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Barbe bleue
Amélie Nothomb

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Saturnine a répondu à une annonce pour une collocation. Dans les beaux quartiers de Paris, un hôtel particulier, pour cinq cents euros de loyer, quarante mètres carré de chambre, la proposition est irrésistible, même si elle paraît louche. L’attente pour se présenter et déposer le dossier est longue… Des femmes sophistiquées, tout le contraire de Saturnine, sont à la file. Sa voisine pour passer le temps, se permet alors quelques indiscrétions… Comment ? vous ne savez pas ?!  Mais si nous sommes toutes là, c’est pour voir le maître des lieux ! Il aurait tué ses huit colocataires précédentes. Il ne sort pas, personne ne l’a vu, ses femmes ont disparu, il est riche, très riche, il s’appelle don Elemirio Nibal y Milcar, il doit être follement séduisant, mais si inquiétant aussi !…

« Calme-toi, se dit-elle. Ne te soucie pas de ces ragots ridicules. Tu es là pour l’appartement, point final. »

Lorsque Saturnine comparaît à son tour, elle découvre un homme altier d’une quarantaine d’années, un teint blême, le regard absent, déprimé. En une brève salutation, une confrontation assez insignifiante, elle est sélectionnée. La chambre est à elle.

« – Bonjour, mademoiselle. Je suis don Elemirio Nibal y Milcar, j’ai quarante-quatre ans.
– Je m’appelle Saturnine Puissant, j’ai vingt-cinq ans. J’effectue un remplacement à l’Ecole du Louvre.
Elle dit cela avec fierté. Pour une Belge de son âge, un tel poste était inespéré, même à titre temporaire.
– La chambre est à vous, affirma l’homme. »

Dans un premier temps, elle n’explore de l’appartement que les principales pièces. Tout lui est accessible sauf une chambre. Antre noir pour les travaux photographiques de don Elemirio, cette pièce est interdite d’accès, sous peine de sanction. Autre lieu où son locataire exerce son talent, la cuisine. Pour sa première soirée, l’hidalgo la convie à partager sa table afin de sympathiser et se dévoiler un peu plus…
Lui… ça fait vingt ans qu’il ne sort pas. Depuis la mort de ses parents. Ermite, il passe son temps à lire des livres sur l’inquisition, à recevoir le prêtre pour la messe du matin, à cuisiner les mets les plus fins…
Elle… jeune Belge venue enseigner à l’Ecole du Louvre.
Très vite, la conversation se transforme en un duel de palabres. Le mordant de Saturnine séduit don Elemirio. Les sujets de discorde sont des attraits désirables, d’autres, plaisirs des sens, sont conjoints. Sur une coupe de champagne, la soirée se conclut par une déclaration… « Extase amoureuse ».

Saturnine ne tombera pas amoureuse. Elle est consciente d’un malaise. Elle est bien trop indépendante. Elle se moque de cet aristocrate, de sa religion, de sa fortune, de ses fantasmes, des suspicions… Non, elle ne l’aime pas. Non… mais si cela devait se passer, finirait-elle comme les autres disparues ?

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Tous les ans, les livres d’Amélie Nothomb charrient des critiques élogieuses, objectives ou sévères. On peut dire que cette demoiselle ne passe pas inaperçue et que ses histoires sont atypiques. Fidèle dès son premier livre, depuis trois ans j’étais déçue. Une déconvenue qui restait quand même bienveillante car j’aime le personnage.
Avec ce livre, conte macabre qui reprend le mythe de Barbe Bleue, on lit du loufoque, de l’absurdité, de la déraison, de l’amour, des passions et du funèbre. Certaines cocasseries sont des coquetteries… les mots sont choisis et embellissent les joutes dialoguées.
Pas à pas, l’histoire se développe et prend la moelle du conte de Perrault. Mais est-ce vraiment une adaptation rebattue et impersonnelle ? Oh que non ! Une volte surprend et remanie l’histoire. Les mondes basculent et rendent une modernité au récit.
Alors que le précédent livre m’avait semblé bâclé et orphelin de quelques pages supplémentaires, j’ai trouvé les 170 pages de ce roman justement équilibrées.
Nothomb fait du Nothomb ? Oui, et j’aime bien ! Si j’en juge son sourire mutin et son oeil canaille, je pense qu’elle a dû s’amuser à jouer les deux rôles. Mais qui est réellement le diable inquisiteur ?

Ce livre est classé dans le mois Halloween, car sous ses airs polis et d’un beau style littéraire, il est glaçant et troublant. Terrible cette douce approche de la terreur !!!
PS. : Le cuir de la fleur sur la photo me fait penser à de la viande. Des tranches séchées comme celles des Grisons…

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Barbe Bleue, illustration de Gustave Doré

Des billets chez Adalana, Argali, Vilvirt, Margotte,
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47 réflexions au sujet de « Barbe bleue »

  1. J’ai lu 5 ou 6 de ses romans en tout, j’y trouve parfois mon bonheur mais je ne vibre pas vraiment en la lisant. Par contre j’aime beaucoup le personnage et son rapport avec ses fans…

    • Vibrer… oui, moi aussi, mon coeur n’est pas en émoi, mais j’aime son vocabulaire. J’aime le ridicule qu’elle provoque, quand c’est complétement dingue et que je me dis… Mais où va-t-elle chercher tout ça ?!!!
      Si tu as l’occasion de lire ce livre, tu penseras à moi dans les dialogues. Les réparties fusent et c’est surréaliste ! Je trouve que ça lui ressemble.
      Tu me diras…

  2. Tu connais mon intérêt pour Nothomb…. Il faudrait que j’essaie de relire ses tous premiers livres car à chaque fois que j’en essaye un depuis trois ans, il me tombe des mains ! Hormis son style impeccable, elle n’éveille rien du tout en moi !!! J’essaierai à l’occasion pour voir !!! C’est comme les betteraves, j’essaie tous les ans d’en manger mais pas moyen………….♥

    • Je pense qu’elle serait contente d’être comparée à une betterave. Ce légume a un goût terreux et Nothomb aime la décomposition. Ca doit être l’odeur de l’humus. Je crois aussi qu’elle aime le rouge. Ton subconscient a dû croiser les deux images.
      Benj n’a pas aimé ce livre, pourtant il est un grand fan. Il n’a pas eu le temps ce week-end d’argumenter la chose à sa petite maman… J’ai donc lu ce roman avec un petit apriori. Résultat final, je trouve que c’est mieux que les deux derniers. J’ai vu les critiques ce matin et les avis sont partagés. En fait… y a meilleur mais aussi bien pire !!!
      Bonne journée Aspho ♥

  3. Je me suis lassée de Nothomb que je ne lis plus… Mais par contre j’ai une vraie fascination pour le personnage, cette fille est incroyable… Vraiment très très spéciale et j’aime ça :0) Et ce qui me fascine aussi c’est cette régularité, cette constante dans ses publications… Un livre par an (et encore il parait qu’elle ne publie qu’une petite partie de ce qu’elle écrit) j’aimerais avoir cette facilité !! Bonne semaine Syl

    • On peut être indulgent et impitoyable parce qu’on l’apprécie. J’essaie d’être impartiale, mais je ne sais plus avec elle !!! C’est pourquoi j’aime lire les avis des copines.
      Bise L’Or

  4. Je n’en ai lu qu’un seul : stupeur et tremblements, j’ai bien aimé son style, j’ai trouvé ce roman bien écrit, le thème de celui-ci m’intéresse mais j’attendrais qu’il sorte en poche !

  5. Je dois le recevoir de la part de PriceMinister, je l’ai choisi parce qu’il est court et que je suis sûre de pouvoir le lire à temps ^^ Mais aussi parce que j’aime l’imagination de Nothomb. Je n’en ai pas lu beaucoup, je ne suis pas encore lassée, et cette histoire de Barbe-Bleue m’intrigue. Et puis si tu as aimé alors que cela faisait 3 ans que tu étais déçue, ça me donne encore plus envie 🙂

    • Oui, je ne m’attendais à rien, sauf l’histoire de Barbe Bleue, mais j’ai été surprise par les échanges, comme une partie de tennis, avec ace et balle de match.

    • Non, j’ai beaucoup à faire dans la maison et je ne peux pas me permettre de rester 10h entre des pages. Mais je serai avec toi… tu vas voir ça sera sympa ! Il faut que je vous trouve des trucs à faire… vais réfléchir…

  6. Je n’ai jamais été trop tentée par cet auteur mais j’ai craqué pour celui-ci, et ça a été une bonne surprise, effectivement ! Je ne lirai pas les derniers, mais je pense me plonger prochainement dans ses premiers romans…

      • C’était le seul que j’avais lu d’elle avant « Barbe Bleue » justement ! Et j’avais aimé, c’était sympa… J’aimerais bien lire « Hygiène de l’Assassin ». C’est lequel ton préféré ?

        • Mon préféré, celui qui m’a fait le plus rire c’est « Stupeur et tremblement ». Après, j’ai lu « Hygiène de l’assassin », « Métaphysique des tubes », « Biographie de la faim » et tous les autres… Donc, à mon avis, je te conseille de lire « Hygiène… » et après « Métaphysique… ». Ce dernier est très bon ! Elle raconte sa vie, petite, avec sa nurse, le Japon… C’est personnel, elle se cible, on la comprend un tout petit peu mieux, c’est parfois abracadabrant, toujours de l’humour, de la dérision, de la souffrance… c’est Nothomb !

  7. Je n’ai lu que son premier, que j’avais bien aimé, mais après son rythme annuel m’a un peu laissée perplexe. Celui là me tente, mais j’attendrais qu’il soit à la bibliothèque ^^

  8. Celui-là je vais me l’acheter, j’ai hâte de le lire, je relirai bien le conte de Perrault avant…j’ai un petit recueil je crois bibliocollège. ça va être dur d’attendre la fin du mois! Super billet! Bises

  9. Pas du tout fan de Nothomb. Une auteure qui publie un livre par an avec une une régularité de métronome ne peut pas (selon moi) proposer à chaque fois des textes dignes d’intérêt. Du coup je préfère ignorer l’ensemble de sa production (peut-être à tort d’ailleurs).

    • Je pense que c’est son éditeur qui lui fait sa grille de parution… business !
      Demain Jérôme, je ne serai pas des vôtres ! mais je viendrai te lire… Je n’ai pas pu aller à ma bibliothèque chercher la BD du mercredi.
      Bonne soirée

  10. Ping : Destination Halloween… avec l’agence de voyage démoniaque | Thé, lectures et macarons

    • Tiens ! Tu rejoins l’avis de fiston aîné ! Je vais venir te lire et mettre ton lien… Mais moi, j’ai aimé les dialogues. Je ne parle pas de l’histoire, seulement des échanges et de l’ambiance. Mon bémol est dans la sympathie des personnages. Ils n’ont pas provoqué d’empathie. Mais je préfère. Pour une fois, le rôle du lecteur me convenait tout à fait… lire et ne pas m’impliquer. J’étais curieuse.
      A très vite Margotte… chez toi…

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